Wendake
- tripmandl
- 19 févr. 2016
- 5 min de lecture
Avant même d’arriver sur le sol canadien, nous souhaitions aller à la rencontre des autochtones pour comprendre leur histoire, leur culture, leur place sur le sol canadien et tout ce qui touche à la spiritualité. En effet, nous sommes aussi attirés par tout ce qui traite des totems, des chamanes, des voyages oniriques, etc. Depuis le début de notre séjour on ne cesse de nous répéter que cela ne sera pas évident car les réserves sont assez fermées. Certains canadiens vont même nous déconseiller de nous y rendre car ils sont alcoolisés et violents.
A défaut d’une rencontre, nous avons fait les principaux musées des civilisations pour acquérir des connaissances sur le sujet. De plus, lors d’une ballade dans le vieux Québec, nous avons échangé avec une vendeuse dans une boutique amérindienne. Cette dernière, une jeune autochtone d’Amérique latine, nous avait conseillé d’aller rendre visite à la nation huronne-wendat qui propose des visites touristiques. Cette attraction touristique nous permettrait peut-être d’affiner nos recherches.
Depuis Québec, il est possible d’aller dans une réserve, celle de Wendake et de ses habitants, les Hurons. C’est l'une des communautés autochtones du Québec les plus dynamiques culturellement[ ]et abrite de nombreuses entreprises florissantes qui emploient les gens de la communauté et aussi de l'extérieur de celle-ci. Comme nous ont dit des québécquois : « ne vous attendez pas à voir des tipis et des plumes ». En effet, le terme « réserve » signifie en fait « communauté » et donc Wendake est tout simplement un village avec des maisons, des commerces, un pôle santé, une école, etc. Ces autochtones ont développé le tourisme autour de leurs traditions. Ils ont aussi construit un hôtel de luxe, un spa, des restaurants et développés des activités estivales et hivernales. Nous concernant, nous avons été visiter le site traditionnel Onhoüa Chetek8e qui est une authentique reconstitution d’un village autochtone du Québec. Une fois le droit d’entrée acquitté, nous nous retrouvons au milieu d’un vrai site pour touristes !!! Tout y est, la boutique de souvenirs, la salle de spectacle et des faux décors. En attendant le début de la visite guidée, nous allons manger nos sandwichs au chaud car aujourd’hui ça caille sévère et ce n’est que le début selon les prévisions météorologiques.
Nous nous retrouvons avec 2 autres personnes. Notre guide, une jeune femme énergique habillée avec un costume traditionnel, nous accompagnera pendant 45 minutes. Elle nous souhaite la bienvenue et se présente avec son prénom amérindien : Osiceca qui signifie tempête en langue wendat. Puis elle poursuit avec son prénom français et usuel qui est Véronique. Ce petit bout de femme est en effet une vraie tempête, voir une tornade !!! Elle a un débit impressionnant et il faut pratiquement courir derrière elle pour la suivre.
Notre première étape débute dans la maison longue, qui est la maison traditionnelle des hurons. Celle présentée se composait de 3 feux de camps.
Le nombre de feux indique le nombre de familles vivant dans l’habitation. Trois feux signifient que 6 familles vivaient sous le même toit, c’est-à-dire environ 30 personnes. Chaque famille se relaie jour et nuit pour entretenir le feu et maintenir une température de 15 degrés. La maison longue est très haute pour permettre la circulation et l’évacuation de la fumée. Les lits étaient surélevés et côtes à côtes. Durant l’hiver, tout le monde dormait près des feux sur des peaux de castors. Au-dessus des lits ils faisaient sécher du maïs et des feuilles de tabac. Il faut savoir que les amérindiens et les indiens sont des sociétés matriarcales. Les femmes choisissent leur futur mari et ces derniers doivent couvrir de cadeaux la future mariée. En gros cette maison longue était le centre névralgique de la réserve.
Puis en sortant de la maison longue, nous nous sommes dirigés vers le fumoir à viande et à poisson. C’était à la fois un garde-manger et un mode de cuisson et de conservation. Juste à côté se trouve la chambre de sudation qui s’avère être un rituel très important dans la tradition et la spiritualité Nord-Amérindienne. L'entrée est tournée vers l'ouest. Des pierres sont d'abord chauffées
dans un feu extérieur, puis placées dans le sol de la hutte à l'intérieur d'un puits central. Parfois arrosées pour créer de la vapeur, elles produisent de la chaleur qui fait transpirer les participants ayant pris place, nus, à l'intérieur. À quatre reprises, des pierres sont amenées dans la hutte, en l'honneur des quatre directions cardinales. La chambre à sudation représente le ventre de la mère et donc les participants s’y retrouvent en position fœtale. Ce rituel était notamment réalisé lorsque les hommes revenaient de la chasse et pouvoir se purifier après avoir tué des animaux pour se nourrir.
Dans la continuité, nous sommes rentrés dans la hutte du Chaman qui vit à part du reste de la réserve. Le chaman, qui pouvait-être un homme ou une femme, est celui qui soigne, qui prévient les maladies, c’est le sage, celui qui parle avec les esprits des morts, qui a une grande connaissance des plantes et de la nature, etc. Le chaman va se servir de la roue de la médecine. C’est une métaphore qui représente la roue de la vie. Le cycle naturel de toutes choses. Vous pouvez l’imaginer comme une roue alignée sur les 4 directions cardinales.
Chaque facette de votre vie tourne autour de son Centre, tout en évoluant et en progressant sans cesse. Les croyances liées à la roue médecine restent vivaces chez les Nord-Amérindiens. Ils s'en servent pour les rituels, les guérisons ainsi que l’enseignement. La roue médecine est utilisée par les Amérindiens comme solution à divers problèmes parce qu’ils lui attribuent le pouvoir de restaurer un équilibre physique, psychique, émotif et spirituel, en créant un lien et une harmonie entre l'individu et le cosmos, en permettant de prendre conscience que les moyens de guérison se trouvent à la fois autour de soi et en soi.
Les chamans fabriquent aussi des capteurs de rêves. Le capteur de rêve est censé empêcher les mauvais rêves d'envahir le sommeil de son détenteur. Agissant comme un filtre, il conserve les belles images de la nuit et brûle les mauvaises aux premières lueurs du jour.
Le capteur de rêves est utilisé pour aider à contrôler les rêves, dans la mesure où l'on peut contrôler ses pensées, sa vie. À l'origine, il était destiné aux enfants qui faisaient de mauvais rêves. Il s'agit d'un petit cerceau fait d'une branche d'arbre. Dans ce cerceau, est tissé un filet de la forme d'une toile d'araignée comportant un trou au centre. Pendant la nuit, les mauvais rêves resteront pris dans le filet, pour être brûlés par les premières lueurs du jour. Les beaux rêves passeront à travers le trou du centre pour être conservés dans les plumes installées autour du cerceau.
Les masques ont aussi une grande importance. Même si je ne peux vous en montrer puisque les amérindiens considèrent que l'image capte les pouvoirs quand on en fait une photo, je vais juste vous parler des masques des chamans. Ceux-ci sont sculptés dans le tronc d'un arbre vivant. Si l'arbre reste vivant, on découpe le masque qui porte les pouvoirs. Si l'arbre meurt, on brûle l'arbre pour chasser les esprits. []Ils doivent être uniques et ne ressembler à personne.
En sortant de la hutte du Chaman, nous nous sommes dirigés vers un mât totémique, celui des Hurons-Wendat. Ce sont des sculptures monumentales qui se présentent sous la forme de poteaux en bois – généralement du thuya géant – sculptés et décorés de symboles et de figures. Les mâts totémiques ne sont pas des objets religieux mais servent plutôt d'emblème pour les familles ou encore de commémoration d'événements historiques.
Les Hurons-Wendat étaient, avant tout, un peuple
d’agriculteurs et de commerçants qui vendait les surplus aux autres tribus. Ils se déplaçaient quand les terres étaient moins fertiles. Souvent persécutés par les Iroquois, les Hurons ont remonté le Saint-Laurent pour s’installer dans la région de Québec peu de temps avant l’arrivée des Français. Pour se faire, ils ont inventés le canoé, fait initialement en écorces de bouleaux.
La visite se poursuit par les habits traditionnels et la situation des autochtones aujourd’hui. Ce peuple Huron-Wendat sont des iroquoiens et non des iroquois qui sont eux aussi des iroquoiens mais accessoirement leurs énemis jadis. D’ailleurs, la fameuse coupe iroquoise n’est pas propre aux iroquois mais aux iroquoiens. Les amérindiens se laisser pousser les cheveux. Mais suite à un deuil, ils se rasaient les côtés du crâne. Ce qui ressemblait à la hure des sangliers c’est-à-dire à la crinière. C’est pour cela qu’ils sont appelés les hurons.
De nos jours, les Hurons-Wendat sont biens intégrés et vivent du commerce et du tourisme. Ce n’est pas le cas de tous les autochtones. Nous posons donc des questions concernant cette problématique sociale et culturelle au Canada. Véronique nous répond mais furtivement car c’est un thème sensible et nous sommes dans le cadre d’une excursion touristique. A la fin de la visite, nous arrivons à discuter avec elle. Pour elle, qui a été avant journaliste en dehors de la réserve, il est essentiel de préserver les traditions et de sauvegarder les privilèges de leur terre natale. Le vrai peuple du Canada est le peuple amérindien. Elle trouve normal de ne pas payer de taxes etc en contre partie de vivre et de travailler dans la réserve. En effet, si un autochtone part vivre et travailler à Québec par exemple, il pert tous ces avantages et doit payer toutes les taxes. Nous nous interrogeons beaucoup car pour nous c’est une forme de colonialisme moderne. Mais c’est tellement complexe et difficile d’en parler tant avec les autochtones que les canadiens, que nous n’en seront pas plus. Tout comme, nous avons remarqué que les canadiens introduisent des éléments des traditions amérindiennes dans les festivités locales mais aucun autochtone n’y participe. Pour Véronique, les Canadiens ont un sérieux problème identitaire et culturel. Les autochtones non, ils savent qui ils sont, d’où ils viennent et font tout pour préserver leurs terres, leurs traditions etc.
Comme quoi, pour chaque pays, la question de l’intégration, de l’assimilation, de l’acceptation de l’autre, existe.
En tout cas, même si le site est très touristique, il nous a permis de toucher du doigt la question autochtone au Canada et de mieux comprendre leur histoire et leur culture.
Nous avons continué notre visite de la réserve en se dirigeant vers les chutes de la rivière Akiawenrahk, puis en rentrant dans quelques boutiques souvenirs et une librairie.
Mais avec ce froid, nous nous attardons pas et attendons péniblement le bus pour rentrer à Québec.
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